TEXTES SUR MA PRATIQUE - 2022

Il y a Diane, Princesse, Léa, Anna, Marion, Sarah, mais aussi Margaux, Yasmine, Ronya, Dune, Hanna, et encore Margo, Gabriella et Annabelle. Dans un imaginaire collectif quelque peu étriqué, elles pourraient être l’incarnation de ce que l’on appellerait rapidement « la jeune fille ». Mais dans ses photographies, Aurélia Casse s’amuse à déjouer les codes trop faciles de cette dénomination. Depuis plusieurs années, elle invente des autoportraits collaboratifs, travaillant avec des amies avec lesquelles elle élabore des mises en scène et des costumes jouant sur de possibles atemporalités de la mode féminine. Les jupes en toile cirée rouge vif, les serviettes de bain aux larges rayures, les chaussettes en lycra pastel côtoient les imprimés panthère et les tricots en maille crochetée. Les coupes de cheveux se refusent à donner des indices plus probants, et les prises de vue – généralement à l’atelier – n’aident pas davantage. Les regards des jeunes femmes, systématiquement tournés vers l’objectif, viennent nous signaler que les corps que nous découvrons n’ont pas pour vocation d’exhiber leur beauté à des fins contemplatives. La « jeune fille » ne s’en laisse plus conter, d’ailleurs c’est elle qui actionne le déclencheur – la poire est généralement visible, comme une sorte de co-modèle. L’imagerie publicitaire est détournée, ses injonctions raillées au profit de la création d’un nouvel imaginaire dans lequel les corps seraient pleinement autonomes et maîtriseraient leur manière de devenir image. Aurélia Casse le sait : cette révolution ne se fera pas sans humour. L’espièglerie comme émancipation, voilà un beau programme.